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Nicolas Forissier, l’auditeur qui a dénoncé la Banque UBS, est-il un délateur ou un lanceur d’alerte ?


Le Tribunal Correctionnel de Paris vient de condamner UBS à une somme globale de 4,5 milliards d’euros et de reconnaître à Nicolas Forissier, le Directeur du contrôle interne, qui n’a pas voulu couvrir les agissements frauduleux de la banque mais les a au contraire dénoncés, le statut de lanceur d’alerte. Pourtant, la hargne à l’encontre de ce dernier ne désarme pas.

Ainsi, pour mon confrère Dupont-Moretti qui se produit dans un théâtre parisien, le lanceur d’alerte qu’est aujourd’hui Nicolas Forissier, n’aurait été hier qu’un « délateur ».

Cette position est bien dans l’air du temps. Ce que l’on exige désormais des salariés, et plus particulièrement des cadres fragilisés par la « bipolarisation des emplois » et la loi travail qui en accélère et en aggrave les effets, c’est une servilité inconditionnelle, au mépris de toutes leurs valeurs personnelles. L’intérêt financier de l’entreprise passe avant tout !

Or, Nicolas Forissier n’est pas un homme servile !

Quand, en 2008, il est informé d’un trafic frauduleux d’aide à l’évasion fiscale au sein de la banque, sa réaction est d’en faire état dans ses rapports d’audit successifs et de résister quand on exige de lui qu’il modifie ses constatations. Il persiste, malgré la déferlante de brimades qui s’abat sur lui :

  • • suppression de la promotion attendue,
  • • réduction de ses fonctions,
  • • réduction de son équipe,
  • • réduction drastique de sa rémunération variable,

Quand, au printemps 2009, il apprend qu’il est inclus dans le plan social en cours, il est soulagé. Mais quand en juillet 2009 on lui annonce qu’il est réintégré, et que s’il veut tout de même partir avec les dispositions du plan, il faut qu’il accepte, dans le cadre d’un accord de confidentialité, de revenir sur les constatations de ses rapports d’audit, il ne se laisse pas davantage circonvenir. Il expédie une lettre recommandée avec accusé de réception au Président d’UBS France en dénonçant « l’aide à l’évasion fiscale et à la fraude fiscale institutionnalisée au sein de la banque ».

Il reste stoïque lorsqu’il est licencié sans indemnités pour « accusations mensongères » et lors des 10 années qui suivront, au cours desquelles il fera l’objet de l’acharnement d’UBS, dont le système de défense est simpliste : Les poursuites judiciaires dont elle fait l’objet ne reposent que sur les fausses accusations de son ancien Directeur du contrôle interne qui est un menteur !

Nicolas Forissier n’est pas un menteur.

Pour moi qui le défends depuis 10 ans devant le Conseil de Prud’hommes, et pour mes confrères William Bourdon et Apolline Cagnat, qui l’ont épaulé lors des multiples procédures pénales, c’est au contraire un homme consciencieux et modeste, courageux et opiniâtre.

Alors, est-il un délateur, comme le clame Eric Dupont-Moretti, ou un lanceur d’alerte ? A chacun de juger !